AMPLI INTEGRE
Après le choc visuel et sonore des blocs push-pull de triodes 212 présentés en exclusivité mondiale par Ming Da Europe au dernier salon Haute Fidélité, l’importateur nous ramène sur Terre avec le petit intégré MD-6L6 équipé de pentodes 6L6, comme son nom l’indique. Plus discret mais aussi beaucoup plus accessible, il s’avère particulièrement surprenant à l’écoute.
Les productions Ming Da qui débarquent en France depuis quelque temps ne ressemblent pas tout à fait à celles, beaucoup plus nombreuses au demeurant, commercialisées sur le marché asiatique. Une raison à cela : la perspicacité de David Vong, importateur et distributeur de la marque pour l’Europe, qui a réussi à persuader la maison mère de concevoir des modèles selon les us et coutumes sonores et techniques de notre vieux continent. Une sélection de modèles a été effectuée, puis un lifting esthétique et un upgrade audiophile ont été opérés sur ces produits que les visiteurs du salon de novembre dernier ont pu découvrir. Parmi eux, l’intégré MD-6L6 dont le prix d’appel très attractif va inévitablement bousculer la concurrence en place.
Mouture européenne
Ce qui plaît d’emblée quand on découvre le MD-6L6, c’est l’esthétique très élégante de son châssis entièrement réalisé en plaques d’aluminium brossé et anodisé noir. Il repose sur quatre pieds en aluminium massif avec tore en caoutchouc de découplage. Il est loin le temps des boîtiers torturés aux allures de vaisseau spatial, la nouvelle gamme d’électroniques à laquelle appartient cet intégré adopte également ce nouvel habit bien plus agréable à l’œil. La face avant a été redessinée avec le concours de Ming Da Europe, elle comporte deux vumètres rétroéclairés encadrant le poussoir de mise sous tension. La face arrière propose la traditionnelle connectique RCA de niveau ligne et deux sorties haut-parleurs sur chaque canal (4 et 8 ohms). La paroi supérieure est abritée sous un capot de protection amovible réalisé en plaques empilées de méthacrylate teinté. Une fois retiré, on découvre les huit tubes, deux magnifiques molettes tournées dans de l’aluminium massif, une pour la sélection d’une des quatre sources et l’autre pour le réglage de volume, et un capot rapporté abritant les trois transformateurs (alimentation et sorties). Ce dernier est dupliqué par une somptueuse télécommande que ne renieraient pas certains appareils dix fois plus coûteux et dotée par ailleurs d’une touche de mise en sourdine. L’octet de tubes se décompose en quatre pentodes 6L6G d’origine Tungsol Russie configurées deux à deux en simple push-pull, deux doubles triodes 12AU7 de marque Ruby faisant office de déphaseurs drivers, et deux doubles triodes ECC83S de provenance JJ en étage de gain en entrée. Après écoutes prolongées, le schéma retenu pour la France a été retouché par rapport à l’original. La tension d’anode des pentodes a été élevée à environ 400 V pour que l’appareil développe plus de puissance, plus de musicalité et moins de distorsion que son homologue chinois. Il a donc fallu remplacer le transformateur d’alimentation en conséquence.
Les composants internes sont de bonne qualité et câblés en l’air, on note des résistances de puissance à film métallique et un câblage parfaitement organisé, torsadé ou blindé selon les signaux véhiculés. Néanmoins, il est intéressant
de noter que David Vong propose en option le remplacement des condensateurs de liaison au polypropylène par des modèles Jensen au papier et feuillard en cuivre pur. C’est cette version que nous avons testée, et force est de constater que les résultats d’écoute obtenus ne poussent pas à revenir en arrière.
Fabrication et écoute
Construction : Depuis la reprise en main de Ming Da Europe par David Vong,
les choses semblent avancer dans le bon sens chez le constructeur chinois qui est à l’écoute permanente des recommandations de l’importateur français. Malgré son statut d’entrée de gamme, le MD-6L6 bénéficie des mêmes attentions que le somptueux vaisseau amiral à triodes 212 de la marque. Châssis en aluminium dessiné pour le marché français, câblage soigné en l’air et sélection aux petits oignons des composants sont quelques-uns des arguments phares de cet intégré.
Composants : Le prix demandé pour ce MD-6L6 ne permet pas d’envisager l’utilisation de composants ésotériques. Néanmoins, ce sont des technologies appropriées qui sont mises en œuvre aux endroits stratégiques du schéma, notamment des condensateurs à film plastique en liaison et des transformateurs de sortie à tôles à grain orienté d’origine japonaise. La possibilité moyennant un léger supplément d’introduire des condensateurs Jensen dans l’appareil est un atout supplémentaire.
Grave : Nous étions en possession d’un modèle disposant des condensateurs Jensen au papier et feuillard cuivre et avons pu jouer également avec quelques tubes N.O.S en lieu et place des 12AU7 et des 12AX7 d’origine. Quelle qu’ait été la combinaison de tubes et après une bonne heure de mise en température, c’est
un registre grave charpenté et capable de descendre que nous offre l’intégré. Le schéma push-pull démontre une mise au point aboutie avec un contrôle efficace des enceintes qu’il pilote.
Médium : La qualité de restitution du médium est excellente. Dans sa configuration originale (tous tubes chinois, ndlr) que reflète notre notation pour tous les critères, l’appareil fait preuve d’une justesse tonale assez étonnante qui, sur des voix ou des instruments à cordes, fait parfois penser à un montage en simple étage. La gravitation harmonique autour de la fondamentale permet une reconnaissance très aisée de chaque partition, la trame musicale se distille avec de la matière, de l’épaisseur. Le réalisme progresse un peu plus avec l’insertion de doubles triodes N.O.S.
Aigu : L’extension dans l’aigu et l’extrême aigu s’effectue avec du filé et une notion crédible de matière sonore. Il est évident que l’option Jensen contribue à ce résultat, mais on peut parier que le MD-6L6 original et ses condensateurs au polypropylène restent très satisfaisants sur ces deux points. L’apport en délicatesse et en extension des tubes d’entrée et driver en version N.O.S est incontestable.
Dynamique : Le schéma du modèle pour l’Europe a bénéficié de quelques améliorations par rapport au modèle conçu pour le marché chinois, notamment en termes de polarisation des pentodes de sortie qui travaillent à plus haute tension et qui délivrent plus de puissance. Cela s’entend en termes d’énergie restituée sur les pointes de modulation. Les baguettes claquant sur les fûts de batterie suivies des impacts de boule sur la grosse caisse (introduction du morceau « Dis-le » par le groupe Baz-Baz, CD test Cabasse) développent une sensation hautement satisfaisante de puissance instantanée. Les pianissimi conservent une bonne intelligibilité à bas niveau.
Attaque de note : Conséquemment à cette modification du point de polarisation de l’étage de sortie, l’alimentation du MD-6L6 a subi une petite cure de body-building qui porte ses fruits au niveau de la réactivité et de l’articulation du message distillé. L’appareil s’avère assez rapide et suffisamment rapide pour permettre d’apprécier avec une bonne précision la localisation des sources sonores. Le gain qualitatif apporté par la mise en place de tubes N.O.S invite à considérer la démarche.
Scène sonore : Le Ming Da nous gratifie d’un espace sonore ample et, pour tout dire, assez familier. Nous retrouvons globalement la cohérence de notre système repère à une échelle certes plus réduite, mais tout semble y être. Belle perspective spatiale, focalisation précise des sources, bonne appréciation de la profondeur et excellente stabilité de l’image. Au prix proposé, le MD-6L6 n’est pas très loin de tenir du miracle…
Transparence : Le degré de définition de cet intégré dans sa version à condensateurs Jensen proposée par l’importateur est excellent. La bande passante apparaît large et l’équilibre tonal est réussi. Sans déployer toute la finesse harmonique des versions N.O.S testées, les tubes originaux créent cependant une certaine surprise par la musicalité qu’ils dégagent dès lors qu’ils sont rodés. Très sincèrement, l’appareil mérite de toute façon le détour.
Rapport qualité/prix : L’utilisation de pentodes 6L6, un des tubes les plus populaires qui aient été fabriqués, sur un appareil à moins de 2000 euros n’est pas monnaie courante. Et la possibilité d’y adjoindre sans se ruiner la neutralité légendaire du papier et du cuivre danois de chez Jensen, le tout emballé dans un élégant carénage en aluminium, met l’eau à la bouche.
Verdict
L’intégré Ming Da MD-6L6 fait partie des très bonnes surprises de cette fin d’année. Les visiteurs du dernier salon Haute Fidélité avait pu l’apercevoir en statique sur le stand de l’importateur, stand illuminé des vives lueurs des blocs à triodes 212. À la réflexion, ces deux extrémités démontrent que la recherche de la meilleure musicalité reste l’objectif prioritaire du constructeur. Le MD-6L6 embarque logiquement plus de compromis techniques, mais sa grande variété musicale valide ce choix. Et nous recommandons l’option Jensen qui exacerbe un peu plus les qualités de l’appareil.
fiche technique
Origine : Chine/France
Prix : 1 890 euros (version standard), 2 190 euros (version à condensateurs Jensen proposée par l’importateur)
Dimensions : n.c.
Puissance nominale : 2 x 35 W sous 4 et 8 ohms
Réponse en fréquence : 20 Hz – 75 kHz à ± 1 dB
Rapport signal sur bruit : > 95 dB
Taux de distorsion : < 1 %
Entrées : 4 RCA (ligne, 200 mV)
Sorties : 3 paires de fiches HP (0, 4 et 8 ohms)