PREAMPLI/BLOC STEREO
Le préampli DAC numérique M12, dévoilé au dernier CES de Las Vegas, et le bloc stéréo M22 de la série Masters sont spécifiquement dédiés à l’audio stéréo. Leurs circuits, dont certains issus du modèle M2, sont de la toute dernière génération numérique.
L’entreprise NAD, acronyme de New Acoustic Dimension, a été créée par Matin Borish en 1972 à Londres. Avec une philosophie essentiellement axée sur la performance sonore, d’une part, et le prix toujours étudié notamment en débarrassant les châssis de toute fioriture esthétique, d’autre part, elle a acquis dès ses débuts une excellente réputation auprès du public. Un de ses best-sellers, l’intégré NAD 3020 conçu vers la fin des années 1970, reste encore gravé dans toutes les mémoires. Acquise en 1991 par la société danoise AudioNord International, la société NAD est depuis 1999 la propriété du groupe canadien Lenbrook Group qui en a été le distributeur exclusif pour le Canada depuis 1978 et son promoteur dans les deux Amériques.
Préamplificateur M12
Comme l’indique la notice, le M12 n’est ni un préamplificateur traditionnel ni un DAC traditionnel, mais s’apparente plutôt à un hub numérique à haute résolution. Une unité de dispatching en quelque sorte où les signaux entrants sont traités de manière numérique. Et ce traitement fait appel à la technologie Direct Digital développée spécifiquement pour l’intégré numérique M2 de la série Masters, par NAD et le fabricant de semi-conducteurs Diodes Zetex Semiconducteur. Nous invitons le lecteur à consulter le document relatif au fonctionnement du M2 sur le site de NAD, néanmoins rappelons de manière très édulcorée que le signal entrant est traité sur 35 bits pour obtenir un rapport signal sur bruit à 1 W suffisamment bas, en l’occurrence plus de 90 dB, et une plage dynamique de plus de 105 dB. Le M12 reprend donc ce principe qui garantit que des signaux encodés jusqu’en 24 bits ne sont ni tronqués ni allégés en détails. L’appareil est logé dans un châssis MDC (pour Modular Design Construction). Réalisé par un assemblage de plaques et de joues en aluminium, ce boîtier reçoit une face avant très épaisse ornée d’une fenêtre centrale à écran tactile, d’une superbe molette de réglage du volume et d’une seconde entrée USB A. La technique propriétaire MDC permet de faire évoluer l’électronique par l’ajout de cartes optionnelles. Le M12 est livré d’origine avec trois cartes (ligne analogique à trois entrées, DAC S/PDIF à cinq entrées et DAC USB asynchrone à deux entrées). Montées verticalement, elles sont constituées d’un circuit imprimé supportant tous les circuits. Elles s’enfilent dans des slots à glissière, l’extrémité du circuit s’enfiche dans un connecteur sur une carte mère de fond de panier prévue pour recevoir six cartes au total. Les options incluent une carte DD HDM-1 (module HDMI à trois entrées et une sortie) et une future carte DD BluOS qui permettra le streaming audio. La carte « ligne analogique », équipée entre autres d’un préampli phono MM/MC, intègre un chip PCM1804 de conversion analogique vers numérique. Les entrées RCA et XLR de la carte DAC S/PDIF sont isolées par transformateur. La carte USB reçoit des chips XMos et Atmel. La carte de fond de panier reçoit un chip de conversion du taux d’échantillonnage SRC43821 et un modulateur numérique à huit canaux CSRA6601, plateforme audio qui, en combinaison avec le menu de programmation à l’écran, permet de contrôler toutes les fonctions du M12 y compris le réglage de volume, l’égalisation du subwoofer, la balance, etc.Les sorties analogiques transitent par un étage buffer œuvrant en pure classe A à partir d’amplificateurs opérationnels de dernière génération.
Bloc stéréo M22
Le M22 est logé dans un châssis similaire à celui du M12, il repose également sur quatre pieds en aluminium massif et s’allume aussi par un interrupteur tactile situé sur le dessus de la face avant. Le bloc stéréo tire sa puissance de deux modules Hyper nCore répondant aux spécifications Power Drive de NAD, et dont les étages d’entrée et de sortie à composants discrets consomment et distordent moins que les précédentes versions Hypex. L’alimentation à découpage étudiée en collaboration avec Hypex permet aux circuits d’amplification de disposer d’une réserve d’énergie importante autorisant plus de 600 W en pointe par canal sous 2 ohms de charge. Un contrôle permanent de l’écrêtage en sortie est effectué en mesurant la puissance moyenne délivrée à la charge, puis en adaptant avec une constante de temps le signal en entrée. Le M22 ne comporte aucun condensateur sur le trajet du signal. Néanmoins, une portion du signal d’entrée est alimentée par un circuit parallèle filtré au second ordre sous 2 Hz. La sortie de cet étage est alors soustraite au signal en tête de second étage de manière à réjecter la composante continue en sortie.
Fabrication et écoute
Construction : La série Masters introduite en 2005 bénéficie d’une finition très moderne et contemporaine dans le choix des matériaux et de la ligne esthétique. L’usage intensif de l’aluminium pour la construction des châssis crée une montée visuelle en gamme des électroniques et plus pragmatiquement un blindage efficace des circuits contre les pollutions à haute fréquence de notre environnement quotidien. La construction modulaire MDC du préamplificateur permettra d’élargir la connectivité selon les besoins de chaque utilisateur.
Composants : Ces deux électroniques sortent techniquement des sentiers battus. Les circuits propriétaires du M12 doté d’un « cœur » numérique Direct Digital n’ont pas d’équivalent sur le marché. Quant au M22, il est le fruit d’une collaboration unique entre un spécialiste mondial de l’amplification numérique et NAD, spécialiste emblématique de l’électronique avec un grand E. Et pour bien marquer son territoire « haut de gamme », le duo est livré dans des emballages spécifiques à la gamme Masters et particulièrement soignés, la notice d’utilisation étant notamment chargée sur une clé USB en aluminium placée dans une petite gaine de cuir.
Grave : On connaissait les bienfaits des circuits d’amplification numérique sur le registre de grave. Nous n’avons pas été déçus en écoutant les NAD dont le rendu du M22 nous a rappelé celui de l’incorruptible Devialet 170 dans les premières octaves. C’est très tendu mais pas court, puissant et articulé de sorte que les enceintes ne sont plus complètement libres des mouvements de leurs boomers. La ligne de basse synthétique du « Moonlight on Spring River » par Zhao Cong gagne sur plusieurs tableaux. La réponse s’étend dans les soubassements, la lisibilité des modulations de la partition s’accroît (ce n’est plus un magma sonore mais bien des fréquences basses qui modulent) et le rendu des enceintes s’affermit grâce à la disparition de certaines petites toniques.
Médium : Quel qu’ait été le type de signal écouté, numérique sur S/PDIF et USB B ou analogique (lecture directe en sortie analogique de notre lecteur Nagra), nous avons été très agréablement surpris par la souplesse et l’élégance du rendu du couple NAD. On ne peut que se féliciter des progrès réalisés en quelques années par les fabricants de circuits numériques désormais intégrés au sein de préamplificateurs comme le M12. Les timbres notamment font mouche, avec une analyse harmonique dense et par conséquent un nuancier tonal très étendu. Et même s’il manque globalement encore un peu d’épaisseur, un peu de texture au message, écouter Carlo Bergonzi interpréter Celeste Aïda avec les M12 et M22 nous a procuré un plaisir intense.
Aigu : Il est révolu le temps où l’aigu distillé par une électronique numérique s’apparentait au crissement d’un ongle sur un tableau noir… Il y a même fort à parier que la très grande majorité des auditeurs à qui l’on ferait écouter l’association M12 et M22 ne se douterait même pas qu’il s’agit d’électroniques à traitement numérique du signal. Le registre est distillé avec beaucoup de finesse et de subtilités harmoniques. Sur « Moonlight on Spring River », on apprécie l’absence de verdeur et d’agressivité de la pipa de Zhao Cong, c’était a priori inespéré… La fluidité des percussions est incontestable, mais le filé, l’extension semblent parfois un peu courts, comme si le dégradé harmonique très cohérent se focalisait principalement sur les premiers rangs. Les notes s’achèvent ainsi un peu plus rapidement qu’à l’accoutumée, mais leur familiarité tonale reste solidement établie par la fondamentale et les premiers harmoniques.
Dynamique : Les chiffres annoncés par NAD en ce qui concerne les puissances crêtes sont éloquents, avec plus de 600 W en pointe sous 2 ohms. Autrement dit, très peu d’enceintes résisteront au pouvoir du M22 par ailleurs doté d’un facteur d’amortissement élevé. Il est vrai que les frappes de boule sur la grosse caisse (« Animal » par Francis Cabrel) sont vraiment percutantes et d’une énergie instantanée très réaliste. Sur les micromodulations, les NAD font bien plus que de la figuration et s’avèrent même beaucoup plus subtils que nous l’imaginions. Les inflexions et autres circonvolutions tonales du clavecin « magnétisé » par Scott Ross interprétant la Sonate K322 de Scarlatti font même parfois songer à de la classe A…
Attaque de note : Nous avons entamé les premières écoutes sérieuses après une petite heure de mise en chauffe des électroniques. Le buffer en sortie du M12 travaille en classe A et puis, quoi qu’on en dise, le numérique aussi est sensible à la température des composants. Ce qui frappe d’emblée avec ces NAD, c’est la spontanéité de leur réponse, de leur comportement. La restitution est vive, lumineuse, rythmée, sans pour autant verser dans l’excès de clarté ou l’ascendance de l’équilibre. Le toucher incisif du pianiste Michael Andres interprétant le finale de la Sonate D959 de Schubert libère des sonorités extrêmement nettes et modulées par la table d’harmonie, l’instrument se matérialise soudain devant l’auditeur.
Scène sonore : Un des reproches souvent formulés à l’encontre des électroniques numériques est leur manque de crédibilité dans la restitution de la profondeur de scène. Alors que l’image stéréo est généralement irréprochable, la sensation d’aération et plus particulièrement l’effet holographique virtuel sont inexistants ou presque, à de rares exceptions près dont ces NAD Masters. On n’atteint pas encore l’excellence des tubes triodes dans ce domaine de l’illusion spatiale, mais les progrès sont très, très sensibles. Sur « Moonlight on Spring River », l’introduction du morceau après le solo de pipa installe une atmosphère assez ample et d’une profondeur très satisfaisante. Les instruments d’ambiance sont précisément focalisés en arrière-plan, les plans sont bien étagés.
Transparence : Les écoutes des M12 et M22 nous ont interpellés par le fait que la technologie de l’amplification numérique a fait un bond qualitatif tout à fait surprenant en l’espace de quelques années, le duo NAD démontrant à cet égard un remarquable potentiel musical. Au-delà des caractéristiques purement techniques très impressionnantes, c’est au niveau de la restitution pure (bande passante, grave exceptionnel, douceur des timbres) qu’opère la séduction de ces électroniques construites pour le futur, comme l’indique le slogan du constructeur. La large palette de qualités subjectives des NAD fait presque oublier leur ADN numérique.
Qualité/prix : Les éléments séparés sont généralement synonymes d’électroniques de haut voire de très haut de gamme, avec des prix en conséquence. La paire de NAD M12 et M22 s’affiche à 8 000 euros, soit à un niveau de prix raisonnable pour des électroniques séparées. Ça reste néanmoins une somme importante pour la plupart d’entre nous. Toutefois, chaque élément constitue à lui seul une valeur sûre en termes de performances techniques (la puissance du M22, la connectivité et le DAC intégré du M12) et d’écoute. Il pourra ainsi être acquis séparément et élever avec bonheur un système vers plus de musicalité.
Verdict
La surprise fut belle de découvrir et surtout d’écouter les NAD M12 et M22. Beaucoup de technologie(s) embarquée(s) dans chaque boîtier, du numérique dernier cri, le tout emballé dans des superbes châssis MDC techno contemporains en aluminium. Outre des spécifications de très haute volée, le duo s’affirme par une restitution exempte des stéréotypes liés au numérique. Il séduit par son ambivalence empreinte de souplesse et de fermeté, d’humanité et de rigueur. NAD = New Acoustic Dimension ? Ça n’a jamais été aussi vrai.
Fiche technique
Origine : France
Prix : 3 999 euros (M12, livré avec télécommande),
3 999 euros (M22)
Préamplificateur M12
Dimensions : 435 x 133 x 383 mm
Poids : 14,5 kg
Entrées analogiques : 1 RCA, 1 XLR, 1 phono MC/MM
Entrées numériques : 2 S/PDIF RCA (24/192), 1 AES/EBU (24/192), 2 Toslink, 2 USB A (24/48), 1 USB B (24/96)
Sorties analogiques : 1 RCA (maxi 8 V RMS, 600 ohms), 1 XLR (2 V RMS), 2 RCA Pre Out ou Sub
Sorties numériques : 2 S/PDIF (RCA et Toslink)
Bande passante : 20 Hz – 20 kHz à ± 0,3 dB
Distorsion : < 0,005 % (2 V RMS)
Consommation en veille : < 0,5 W
Amplificateur M22
Dimensions : 435 x 103 x 379 mm
Poids : 15 kg
Puissance nominale : 2 x 250 W (4 et 8 ohms)
Réponse en fréquence : 3 Hz – 100 kHz à – 2,5 dB
Distorsion : < 0,005 % (250 W)
Sensibilité : 1,6 V
Consommation en veille : < 0,5 W
Entrées : 1 RCA, 1 XLR
Sorties : 2 paires de fiches HP